#Belle mais pas bête

A la rencontre d’une créatrice de bijoux hors-normes

Il y a des jours où une geekette amoureuse de bijoux comme moi est comblée. Et le jour où j’ai découvert les créations de TheBlueKraken en a fait partie !

Je travaillais euh cherchais de la documentation procrastinais à fond sur le net quand j’ai découvert ça :

Une tête de mort que j’adore. Vous avez vu les orchidées dans les yeux ?

Aussitôt, j’ai décidé de pousser la recherche de documentation découverte de ces bijoux que j’avais très envie de m’offrir, et je suis tombée dans un univers fascinant, celui de The Blue Kraken, une créatrice de bijoux pas comme les autres.

(Une « créatrice » tout court, d’ailleurs, car elle fait aussi de la poterie, des peignes, bref je crois qu’elle transforme tout ce qu’elle touche). Tellement fascinée, la Lily, qu’elle a posé des questions, papoté avec The Blue Kraken et décidé de vous raconter tout ça.

pendentif tete de mort
Comme un air de famille, vous ne trouvez pas ?

La série de questions « t’es qui toi » ?

Tu t’appelles vraiment « Blue Kraken » ?

Non pas vraiment ! Je m’appelle Amanda Rethman. Il y a quelques années, j’avais été fascinée par la légende du Kraken, (note de Lily : chercher frénétiquement sur Google pour avoir l’air intelligent, je vous raconte en bas de l’article), et j’ai gardé ce pseudo.

Collier papillon bleu
Papillon en argent et circuits électroniques… et bleu !

J’aime beaucoup le bleu, et j’adore les pieuvres et les calmars. Ce sont des créatures brillantes, elles s’adaptent remarquablement bien à leur milieu, et ceux qui sont des prédateurs sont parmi les plus efficaces et les plus puissants qu’on trouve. Même si j’ai beaucoup changé depuis l’époque où j’ai choisi ce pseudo, je l’ai gardé, il me convient, pour d’autres raisons maintenant.

Comment es tu « entrée » en bijouterie ?

Ma grand-mère était une orfèvre et une joaillère, à l’époque où ce milieu était très macho, et hostile aux femmes. Elle a créé beaucoup de bijoux pour Sears et Tiffany, et c’est elle qui m’a élevée. Elle m’a appris la majeure partie de ce que je sais.

ambre et topaze
Un ensemble qui imite l’ambre, avec des cristaux Svarovski couleur topaze

Ca explique la qualité de tes bijoux. Comment as tu complété ta formation ?

En dehors de la transmission de ma grand-mère, je n’ai reçu aucune autre formation. J’apprends de nouvelles techniques sur le tas, en tirant les leçons de ce qui ne marche pas… et de ce qui marche – ça arrive aussi !

J’ai appris beaucoup de techniques de cette façon, au cours des années. J’aime me lancer des défis, chaque jour, et apprendre de nouvelles choses. Finalement, j’ai fait un petit peu de tout, cela va des peintures traditionnelles sur toile à la poterie, en passant par la couture et même la technique de la maille de fer.

pendentif malachite
Un pendentif malachite et « circuits », là aussi je craque !

 

On peut critiquer mon travail en disant qu’il manque de cohérence, à cause de ces différents styles et matériaux, mais j’aime vraiment sortir de ma zone de confort, et maitriser de nouvelles choses.

Pour la bijouterie, c’est un peu particulier : j’ai commencé cela pour gagner un peu d’argent, parce que c’était pratique, cela ne demandait pas beaucoup d’espace.

Je vends principalement sur internet, sur mon site et de temps en temps je participe à des expositions, ou je mets des pièces en vente dans des galeries à Ashville (Note de Lily, TheBlueKraken a la chance d’habiter en Californie !)

Pendentif ambre
Un pendentif avec un fossile et un circuit dont la transparence évoque l’ambre

Et justement (mode Material Girl on) est-ce que cela te permet de gagner ta vie ?

En majeure partie, oui, d’ailleurs j’ai des plans pour m’agrandir, trouver un meilleur local.

La série de questions : comment on crée un bijou

D’où te vient ton inspiration ?

La plupart du temps de la nature : je suis passionnée de botanique, d’entomologie, j’observe les oiseaux. J’aime tout particulièrement les orchidées, et j’essaye de produire des bijoux qui soient proches de ce qu’ils représentent, pas juste une évocation lointaine, trop stylisée (Note de Lily : c’est pas évident, quand on fait un papillon avec des circuits d’ordinateur, mais c’est vrai, c’est réussi !)

collier papillon
Ce papillon de nuit est carrément splendide, non ?

 

Je m’intéresse aussi à la science, la science fiction et le fantastique (d’où le Kraken), et j’aime beaucoup les dragons.
Pour les dragons, je suis plus libre que pour les pièces « naturelles ». Je pars d’une courbe, et je dessine leur corps ainsi, en m’inspirant quand même des reptiles et des oiseaux, pour obtenir une anatomie crédible.

Tu insistes beaucoup sur le recyclage. Qu’est-ce qui vient en premier ? La matière ou l’idée ?

Je travaille d’abord sur une idée de bijou, il est beaucoup plus rare que je trouve un objet ou une matière que j’ai tellement envie de préserver que je construise un bijou à partir de ça.

J’aime bien les couleurs vives, je choisis les couleurs pour mon bijou, et après je cherche les matériaux qui conviennent. Leur état, leur solidité sont importants aussi, ils doivent pouvoir « supporter » le travail de l’orfèvrerie.

disque dur ginko doré
Des boucles d’oreille à base de… boitier de disque dur !

 

La plupart de mes bijoux sont élaborés sur le contraste entre la nature et la machine. Pour cela, j’aime beaucoup les circuits électroniques. Ils sont très intéressants, avec tous leurs assemblages et leurs câbles minuscules. Ils ressemblent à animal disséqué, et on peut y trouver beaucoup de symbolisme.

Habituellement, je travaille en rajoutant des fleurs, des feuilles, des guirlandes qui contrastent avec l’objet mécanique au centre.
Mon but essentiel, c’est de créer des bijoux qui sont beaux, et qui vont avoir une réelle valeur pour celui qui les porte. Des bijoux que les gens vont aimer, et dont ils n’auront pas envie de se débarrasser.

collier dragon
Et ce dragon ? Envie de le mettre à votre cou avec ses jolies courbes ?

 

Finalement, le recyclage c’est secondaire ?

Oui et non.
Le recyclage est secondaire, mais il est important. Je ne vais pas m’empêcher de faire une belle pièce parce que je voudrais absolument recycler quelque chose.
Beaucoup d’artistes qui créent en recyclant font cette erreur : ils se focalisent tellement sur le recyclage qu’ils ne consacrent pas assez de temps à l’esthétique. J’ai vu beaucoup de « créations artistiques recyclées » qui étaient mal faites, et ressemblaient trop aux déchets dont elles étaient tirées, sans réelle transformation créatrice. (Note de Lily : oui, c’est vraiment ce qui m’a frappée dans ces bijoux : leur beauté et leur qualité hors du commun).

Quand je mélange, dans mes bijoux, des gemmes et des matériaux neufs, j’y rajoute toujours un peu de recyclage. Je veux que les gens réfléchissent, qu’ils regardent autrement les choses que nous considérons ordinaires, laides ou inutiles. Est-ce réellement ainsi ? Comment peut-on le transformer ?

La série de questions : mais comment tu fais ces bijoux ?

Est-ce que tu modifies les circuits électroniques, les embellis ?

Il faut beaucoup travailler pour transformer un circuit électronique en un bijou comme cette broche « Cardinal ».

broche cardinal
C’est vrai qu’elle est réaliste et décalée !

 

D’abord je ne change jamais les couleurs avec lesquelles je dois travailler. Je prends ce que j’ai, sans trop modifier le matériau d’origine. Je veux que cela soit à la fois familier et reconnaissable.

Je laisse sur la carte les résines colorées et les traces de métal, j’enlève tout le reste, les résidus, les puces, le plastique… Je choisis mes cartes pour leur couleur et elles doivent être conformes à la norme RHos (note de Lily … euh ? Google, Bing au secours, ah oui, ne pas contenir de matériaux dangereux ! )

boucles d'oreills ginko
Encore des boucles d’oreille en forme de feuilles de ginko, mais argentées

Je polis les traces qui apparaissent sur les circuits, et je les recouvre avec un enduit ou de la résine. Je peux utiliser certains plastiques, aussi, ou du métal (note de Lily : j’adore les boucles d’oreilles « Ginkgo », quand je pense que ça vient d’un ordinateur…)

Comment travailles tu le métal qui entoure les morceaux de circuit ?

J’achète moi même à des marchands à qui je fais confiance la majeure partie du métal que j’utilise pour mes supports en argent massif, ou mes filigranes en maillechort ou en cuivre. Tout est taillé et percé à la main, et je garde tous les restes. Quand je fais du Mokume-Game, j’utilise les restes de métaux variés, y compris bien sûr mon propre argent.

boucles mokume
Boucles d’oreilles cristal et mokume

 

Est-ce que tu fonds tes bijoux ou est-ce que tu travaille « à la cheville » ?

Je n’ai pas encore fondu de pièces, j’aimerais bien faire cela, mais je n’ai pas l’équipement pour. Je travaille donc tout à l’ancienne.

Parmi toutes les techniques que tu utilises, laquelle préfères tu ?

C’est vraiment difficile à dire. En ce moment, je travaille le Mokume-Game et le métal repoussé. J’aime vraiment beaucoup les textures et les motifs que l’on peut créer avec le métal, et les contrastes que permet le Mokume.
Pour le repoussage, ce que j’aime, c’est qu’on faire n’importe quelle forme. Je suis encore en train d’apprendre, de découvrir comment former les plis, et j’adore ça. Et finalement, je trouve très relaxant de faire des chaines de maille et du Kumihimo

Et la légende du Kraken alors ?

La légende du Grand Kraken, donc…. est une légende qui nous vient de froid, et qui n’a rien, mais rien à voir avec les bijoux. Le Grand Kraken, c’est un poulpe géant, qui serait capable de faire sombrer des bateaux entiers. De loin, on pourrait le prendre pour une île. On pense que, comme toutes les légendes, il y a un fond de vrai, car il y a bien des calmars géants, qui font, tentacules comprises, plus d’une vingtaine de mètres.

Mais malgré tout, on n’a jamais vraiment eu de preuves qu’un bateau puisse être coulé par un Kraken. Il y a bien eu un naturaliste français, un certain Pierre Denys, qui a raconté n’importe quoi, mais comme il a eu un démenti, il a perdu toute crédibilité et on n’a jamais plus entendu parler de lui. C’était peut-être le premier hoax de l’histoire !
Le Kraken, c’est aussi l’emblême des méchants Greyjoy, dans le Trone de Fer (évidemment comme je lis la version française, je ne savais pas).

Mokume-Game et Kumihimo

Deux techniques japonaises, qui sont de plus en plus à la mode chez les bijoutiers. Le Mokume-Game est une espère de millefeuilles de métal, et le Kumihimo, c’est l’art de tresser des cordelettes savantes, notamment celles qui servent à accrocher les sabres à la ceinture.

C’était la minute culturelle de Lily, qui aime bien connaître les histoires derrières ses bijoux.

Lily

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écrit par Lily
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6 réflexions au sujet de « A la rencontre d’une créatrice de bijoux hors-normes »

  1. Magnifique !
    Ça change des bricolages que l’on voit parfois avec des morceaux de circuits imprimés. J’adore l’association avec des matières plus précieuses. Le pendentif avec le fossile est superbe, même si je me doute bien que Lily préfère la tête de mort^^ qui est superbement réalisée.

  2. En tant que bijoutier je trouve vraiment que ce coté recyclage et circuit imprimé apporte un vrai plus et je n’avais pas souvent vu cela. On a l’habitude des bijoux « classiques » peut-être trop d’ailleurs.

    Merci d’avoir fait partager votre belle découverte !
    Bonne continuation

  3. Les bijoux les plus insolites sont les bijoux les plus recherchés de nos jours, ils sont très appréciés par les gens qui veulent se démarquer et ne pas ressembler à monsieur ou madame tout le monde.
    L’or reste une valeur sure, cependant et heureusement, il en faut pour tous les goûts.

  4. Au top !

    J’adore l’idée d’utiliser le circuit imprimé comme matière première, rendre quelque chose de « moche » à la base en un jolie bijou il fallait oser et c’est vraiment très réussi.
    J’ai une grosse préférence pour la tête de mort c’est trop bien fait !

    Merci pour m’avoir fait découvrir =)

  5. Quelle originalité ! J’adore ce genre de bijoux, ça change carrément des bijoux habituels … Merci pour l’info !

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